BUZZ AVRIL 2002 :
"La dernière de Saez"
Comme il l'avait fait à Marseille et Lyon la semaine précédente,
Damien Saez était attendu le 4 mars à Nancy pour une audition
privée de son nouvel album, en présence de professionnels, représentants
des médias, disquaires, etc. Il n'est finalement pas venu, confirmant
un peu plus sa réputation de personneage hors norme. Organisée
sous les ors de L'Arquebuse, haut lieu de la vie nocturne locale, cette soirée
n'en a pas moins constité un moment inoubliable de musique. Programmée
en boucle, sa dernière réalisation, double, mélange avec
un bonheur incroyable de musique classique et electrique. De son passage au
conservatoire de Dijon, le jeune pianiste maintes fois primé a tiré
sa capacité à donner une virulence troublante à ses partitions
acoustiques. Son second CD, "Katagena", mêle claviers et cordes
dans la plus absolue des audaces phoniques. L'introduction de ce concept, où
se trouve remis en forme le pathétique de l'aventure humaine , est un
modèle du genre. D'un enregistrement à l'autre, d'une guitare
saturée au lamento d'un violon, les thèmes se répondent
et s'entrechoquent, tous désepérés. Entre le "jeune
prodige" et Nancy existe une tendre complicité. C'est au Terminal
Export qu'il a donné son premier concert au printemps 2000. A la fin
de l'année, il était de retour dans le cadre de NJP. Il ne devrait
pas tarder à revenir... après avoir réglé ses démêlés
avec la Justice... Le 6 Mars, en effet; Damien Saez était convoqué
devant la cour d'appel pour débattre sur sa condamnation à six
mois de prison ferme pour insoumission à l'autorité militaire."
Après le succès phénoménal de "Jours étranges"
(1999), Damien Saez nous offre un tour de manège hallucinant sous forme
d'un double manifeste intitulé "God Blesse". D'une richesse
musicale impressionnante, ce projet conceptuel et particulièrement ambitieux
enchaîne à un rythme effréné, sur fond de loopings
obsessionnels, rock (dé)générationnel ("J'veux du
nucléaire", "Solution"), ballades subliminales intimistes
("So Gorgeous", "No place for us", "J'veux qu'on baise
sur ma tombe", "Be my princess", "Light the way", "Isn't
it love I", "A ton Nom"), techno hardcore a corps ("Sexe"),
thèmes classiques aux orchestrations luxuriantes ("Lignt the Way
- Interlude", "Thème I", "Thème II"),
pop songs imparablement tubesques ("Isn't it love II", "Perfect
World"), délire néo-psychédélique à
dominate instrumentale ("WTC"pour World Trade Center, "Route
666", "Ice cream on an acid trip") et chansons s'inscrivant dans
la grane tradition française ("Les condamnés" "Saint
Petersbourg", "Massoud", "Les Hommes", "Usé",
"Menacés mais libre"). et "Voici la mort", clef de
voûte céleste et majestueuse, éclair de génie frappant
l'âme en plein ciel, renvoyant les Dieux dans les cordes misérables
qu'ils ont passées au cou de l'humanité. Symphonie d'un chaos
annoncé, lithanie d'une désespérance maladive, chronique
d'un monde aliéné en pleine implosion, "God Blesse"
démontre magistralement que Damien Saez assure la relève et tisse
le lien (non seulement en tant que chanteur à la voix aux multiples octaves,
mais aussi et surtout en tant que compositeur flamboyant et auteur virulent)
entre Jacques Brel, Léo Ferré, Edith Piaf et Noir Désir.
Ce disque bouleversant possède toutes les chances de provoquer un cratère
dans le paysae musical hexagonal: il insuffle le même esprit de révolte
maligne et contagieuse qui émane du couvercle d'un piano évadé
du Conservatoire, ou de la distorsion névralgique d'une guitare saturée.
Chapeau bas, Monsieur Saez.